Pour des épidermolyses bulleuses héréditaires (EB) sévères, il n’est pas rare que l’ordonnance ne tienne pas sur une page ou qu’il y en ait plusieurs. Il n’est pas toujours simple pour les patients de s’y retrouver (consignes pas toujours faciles à comprendre, posologies, indication, gestion des stocks …) mais pour les pharmaciens non habitués, non plus. En effet, ces ordonnances à rallonge s’accompagnent souvent de prescriptions inhabituelles, avec des doses importantes, des protocoles différents, de l’hors AMM (Autorisation de Mise sur le Marché), des interrogations sur le remboursement de certains produits ….On va essayer de déchiffrer ensemble les problématiques les plus couramment rencontrées et de vous donner quelques conseils.
Tour d’horizon de l’ordonnance pour l’EB
On trouve généralement sur ces ordonnances :
- en 1er lieu toute une panoplie de pansements hydrocellulaires en quantité plus ou moins importante. Ensuite les dispositifs nécessaires pour les fixer (tubisfast, bandes …)
- Ensuite des traitements antalgiques pour traiter la douleur, certains même disponibles uniquement en milieu hospitalier (ropivacaïne ….)
- Des topiques comme le cytéal, dexéryl ….
- Nutrition orale et entérale
- Ophtalmologie : collyres et vitamine A
- Des médicaments prescrits hors âge et hors AMM (lorsque le médicament est prescrit pour d’autres pathologies mais pour lequel il existe une expérience dans l’EB)
- Des émollients
Difficultés que l’on peut rencontrer lorsque l’on se retrouve face à nos ordonnances
Parmi les difficultés rencontrées :
- le pharmacien peut délivrer des DCI (Dénomination Commune Internationale, c’est-à-dire le nom de la substance qui le compose) alors que sur l’ordonnance figure le nom commercial ce qui contribue à créer une confusion
- le conditionnement entre ce qui est délivré à l’hôpital et en ville peut varier et donc le dosage (ex : l’oramorph buvable chez l’enfant, on peut s’y perdre entre les ml et les mg).
- Les ordonnances de morphiniques stupéfiants sont à faire sur une ordonnance sécurisée tous les 28 jours, ce qui nécessite un nombre de renouvellement important d’ordonnances pour les experts qui suivent notre maladie. Il faut parfois « négocier » avec le pharmacien pour qu’il accepte de nous « dépanner » sans tomber en rupture.
- Plusieurs pansements peuvent nécessiter au pharmacien de passer des commandes, avec des niveaux de stock très importants (jusqu’à plusieurs dizaines de boites par semaine) surtout lorsque les plaies sont très étendues et à refaire parfois plusieurs fois par jour
- La galénique : pour l’EB on favorise des médicaments faciles à administrer, généralement en sirop, du fait des atteintes muqueuses . Les médecins prescrivent du coup souvent des PMR (Préparation Magistrale Remboursable) ce qui amène le pharmacien de ville à préparer ces médicaments.
Conseils :
- Pour stocker chez vous ou quand vous partez en vacances : sortez tous les pansements de leur boite pour gagner de l’espace. Vous pouvez aussi vous faire livrer vos pansements ou poches d’alimentation sur votre lieu de vacances par un prestataire spécialisé ou passer commande auprès d’une pharmacie sur place.
- Avant d’aller à la pharmacie récupérer vos pansements, scannez-leur l’ordonnance (et assurez-vous qu’ils l’ont bien reçue) ou appelez-les. Souvent, ils doivent commander certains traitements, ça vous évitera d’aller plusieurs fois à la pharmacie.
- Essayer d’anticiper autant que possible les commandes
- Votre pharmacien doit être le plus aidant possible dans la gestion de ces commandes et des stocks. N’hésitez pas à lui demander s’il peut vous livrer à domicile et vous faire des dotations gratuites sur tout ce qui n’est pas remboursé (tubifast, aiguilles, sérum physiologique ….). Si cela n’est pas possible pour lui, n’hésitez pas à solliciter des prestataires de service spécialisé.
- N’hésitez pas à revoir l’ordonnance avec le médecin et le pharmacien en cas de doute, le pharmacien peut aussi par ailleurs prendre contact avec le médecin.
Article rédigé à partir de l’intervention sur Pharmaradio du 17/06/2021 du Dr Nathalia Bellon, dermatologue au centre MAGEC de l’hôpital Necker à Paris.
Accéder à ce podcast : https://www.pharmaradio.fr/podcast/le-mag-des-pharmaciens/le-mag-des-pharmaciens-de-david-paitraud-8344