Regard symbolique et poétique sur les maladies inflammatoires

Ou comment apprivoiser le dragon de feu qui hurle en nous ?

Vivre avec ses écailles et ses écueils

Apprendre à vivre avec des écailles fragiles comme les ailes de papillon, c’est accepter sa vulnérabilité, ses différences. Ça demande bien du courage. Au départ du moins, on en bave comme la chenille… avant l’envol !
Quand l’orage gronde, quand la maison brûle, s’installer confortablement au coeur de soi, comme dans un fauteuil douillet ou au bord d’un lac limpide, c’est pas gagné !  Se laisser être, oser regarder les dégâts, ce qui est abîmé ou mort en soi, choisir aussi de célébrer les parts les plus vivantes, se concentrer sur ce qui circule, se transforme…tout ça prend du temps, toute une vie parfois ! Ainsi, mon intestin s’enflamme encore et toujours, mais désormais, je suis rarement « malade ». La plupart du temps, j’appelle ça mes « crises de guérison ». Mon corps se détend aussitôt vu que je lui offre une perspective plus réjouissante, un pronostic plus engageant. Je ne serine plus à mon cerveau toujours la même rengaine : qu’il risque de mourir ou d’avoir mal, je lui dis avec confiance qu’il a le pouvoir de vivre et d’éteindre le feu. Certes on n’a pas trouvé de médicaments pour me guérir mais j’ai trouvé mes mots-calmants et ça change la durée et l’intensité des crises. Alors comment ne plus allumer le feu en nous, comment apprivoiser nos émotions et mémoires d’écorchés vifs ?

Mission impossible n’est pas soumission

Accepter la maladie vous dites…euh ? c’est bien beau comme idée mais est-ce bien raisonnable, est-ce possible même ? Accepter ce qui est quand ce qui est semble particulièrement inéquitable, douloureux, intolérable, invivable parfois, n’est-ce pas tout simplement mission impossible ?
Pourquoi se demander l’impossible quand on fait déjà beaucoup d’efforts au quotidien pour exister avec la maladie ?
Mission impossible ne veut pas dire pour autant soumission au mal ou aux épreuves répétées traversées depuis la naissance. S’y soumettre, ça voudrait dire intégrer définitivement le scénario de départ qu’on n’a pas vraiment choisi, il faut bien le dire.
Être malade n’est pas forcément être maso : tout le monde n’est pas fan des scénarioscatastrophes ni des films d’horreur après tout …surtout quand il s’agit de sa propre vie !
Alors comment donc est-ce qu’on pourrait bien intervenir dans ce foutu scénario d’origine qui ne nous plait pas trop? S’autoriser à jouer un autre rôle que celui du malade ? Réinvestir le corps d’autres missions ? Voici quelques amorces symboliques, ludiques ou mini récits pour regarder la maladie plus en douceur, se libérer de l’espace pour respirer à l’intérieur du mal ou de la douleur qui nous affectent.

Souffrir ou s’offrir ? Dessiner sa propre palette de vie

On dit souvent que la vie ne tient qu’à un fil ! Moi je décrète qu’elle ne tient qu’à une lettre parce que c’est plus amusant ! Par exemple, si j’enlève le u de souffrir, il ne nous reste plus qu’à s’offrir : s’offrir à la vie ou s’offrir le meilleur, apprendre à recevoir et ne pas seulement donner. Imaginons maintenant souffrir sans ses ff ? Ça devient sourir ! Sourire à la vie plutôt que le programme « souffrance», religieusement perpétué dans nos cellules par des siècles et des siècles de soumission à des principes de sacrifice et d’évolution dans la douleur.
En un tour de plume (enfin de clavier), on escamote une lettre et hop, on change la perspective pour un scénario beaucoup plus joyeux. Pfff ! Une lettre ou un mot qui sauvent…vous y croyez, vous ? Moi oui, parce que quand nos maux nous submergent, nous paralysent, nous clouent au lit ou entament sérieusement notre élan de vie, les mots, eux, restent libres de leur mouvement en nous et autour de nous. Ils sont les bons et loyaux porteurs de nos mémoires, émotions, douleurs, traumas enfouis, indicibles ou bloqués quelque-part, dans un coin du coeur, de la tête ou de n’importe quel autre organe, selon ce que ces organes symbolisent pour notre cerveau et notre mémoire cellulaire.
Si les mots sont vecteurs de nos peurs, ils peuvent être aussi les messagers de nos espoirs et de nos envies, les touches de couleurs, les saveurs, les tonalités que l’on choisit de donner à notre vécu, véhicules libres de conter notre propre récit de vie. Comme bon nous semble !
Il ne s’agit pas de manipuler les mots ni de se raconter des histoires, de nier la réalité ou les difficultés, mais plus de quitter les programmes obsolètes enregistrés dans nos cellules, de choisir désormais plus librement l’histoire que l’on va se raconter, la vie qu’on va se créer.
Tracer des chemins neuronaux de traverse pour renouveler la mémoire du corps. Avoir les nerfs en boule, à vif, avoir les nerfs tout court, se faire du mauvais sang, se ronger les sangs, brûler la langue, ça en fait des expressions pour raconter les états de sur-stress, d’hyper-vigilance ou de surchauffe par lesquels passent notre corps et notre système nerveux. Et si nous étions tous des êtres inflammables ? avec pour certains d’entre nous, des pouvoirs d’incandescence un peu plus élevés que la moyenne, voire surpuissants. Quand on détient un tel pouvoir de « mettre le feu » et qu’on naît plutôt sensible, logique qu’on ait très peur de cette grande puissance ou qu’on la retourne contre soi plutôt que risquer d’être un pyromane pour ses proches. Celui ou celle qui porte les messages inconscients mais brûlants de vérités de la famille. Ça commence tout petit et on n’apprend pas à l’école à apprivoiser ce dragon intérieur cracheur de feu hélas ! Alors, quitte à brûler de l’intérieur, on contient, on retient sur des générations parfois, des émotions fortes, de lourds secrets, des souvenirs trop douloureux, de grandes injustices, d’énormes chocs ou blessures. Les corps ont tout stocké, tout transmis, question de survie de la lignée ! Ça nous brûle la langue, nous met la peau à feu et à sang, tous ces non-dits, toutes ces émotions retenues, ces sentiments interdits, tous ces silences imposés ou ces mémoires tout simplement enfouies.
Ça se retourne contre nous. Le cerveau (qui a une tête bien faite, forcément !) mémorise et analyse les incidents, les chocs, les dangers en particulier et transmet l’info de corps en corps pour bien remplir la mallette de données de survie de mère en fille, de père en fils. Diplomatique valise qu’on se trimballe dans la famille sans toujours avoir le droit ou les clés pour l’ouvrir et regarder ce qu’il y a à l’intérieur. En bonnes servantes fidèles et performantes (au service de la vie j’entends), nos cellules gèrent donc l’invisible ; elles enregistrent toutes les données, s’adaptent, réagissent, mutent. Le corps libère alors les bons (ou les mauvais) ingrédients, enclenche les fonctions en réponse aux données transmises pour nous maintenir en vie et permettre la reproduction de cette vie. Il arrive que notre cerveau, qui ne fait pas la différence entre le symbolique et le réel, confonde l’agent agresseur réel avec l’émotion qu’il a suscité par le passé. Il active alors sans cesse le même vieux programme ou en crée une mauvaise interprétation, une réaction excessive du corps suite à la donnée originelle enregistrée. Il lance l’alerte générale, sans vérifier si la réponse sera la plus appropriée à la situation présente. Risque d’affolement cellulaire garanti !

Jouer avec le feu et laisser circuler l’eau

Être atteint d’EB (epidermolyse bulleuse) pour un enfant, c’est comme apprendre chaque jour à jouer avec le feu, puisque chaque mouvement, chaque acte ou interaction avec les autres peut entraîner une inflammation, une écorchure, une plaie à vif. Et très franchement, difficile de dénicher et dénoncer l’incendiaire puisque c’est une protéine aux abonnés absents. Le crime est presque parfait, comment combattre l’absence ! Face à ce vide de sens, ce manque impossible à combler, il nous reste le corps, fidèle au poste, témoin qu’on est bien vivant, malgré toutes les douleurs. Le corps qui ne lâche pas l’affaire. Faire équipe avec ce corps hautement inflammable, ce corps délicat, fragile et si endurant à la fois, bien décidé à être, c’est une bonne option ! Pas question de nier ce qu’il ressent … Le sentir vibrer, l’autoriser à raconter l’histoire, la mémoire, l’héritage de données qui circulent en lui et activent telle ou telle réaction. L’écouter, l’observer, l’aimer pour l’apaiser, le rassurer, doucement mais sûrement. Bercer, retrouver la bonne fréquence pour chaque cellule, chaque parcelle de peau, pour qu’elles entendent qu’il n’y a plus de danger ! Il n’y a plus de paroles ni de souvenirs indicibles, plus d’agents secrets à garder planqués dans le ventre au péril de leur vie, plus d’ordres d’auto-destruction par le feu des messages clandestins, plus de corps qu’on brûle pour leurs connaissances, pour leur origine ou pour leurs paroles libres.

Et si, libérés de la mémoire du monde, tous les enfants pouvaient déployer leurs ailes en paix et en sécurité ? S’il n’y avait plus d’effet papillon lié à la peur ou au sacrifice cultivés de génération en génération ? Juste un grand envol dans l’air libéré , dans l’ADN allégé de mémoires et de fardeaux ancestraux ! Comme ce grand bal très prisé des Écailles chinées sur l’île de Rhodes en été, cette vallée au micro-climat frais que les papillons ont choisi pour se rassembler et s’aimer.
Et si…comme ce papillon-tigre de nuit qui voit son île brûler et l’excès de feu des hommes détruire sa vallée, les enfants-papillons venaient éclairer l’obscurité de leurs plaies rougies, pour nous demander d’arrêter de déconner avec les allumettes, d’arrêter de perpétuer le malheur, nous implorer de changer le disque dur de l’humanité ?
De s’offrir un nouveau disque doux !

Par Laurence Ramolino, médiatrice, auteure et troubadouce, atteinte du Syndrome de l’Intestin Irritable.
www.lentrepriseamoureuse.com

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Le jeu médidatif de la pelote de vie

Je m’installe dans un coin calme et que j’aime, un endroit où je ne serai pas dérangée.
Je respire tranquillement et profondément. Je ferme les yeux, doucement je déroule ma pelote de vie à l’intérieur du corps. C’est comme un labyrinthe. Elle passe par tous les vaisseaux, relie les cellules entre elles, repère les creux, les verrous, les noeuds, les bosses, les recoins dans l’ombre. Comme une corde sensible, la pelote met en vibration toutes mes sensations, accroche et fait circuler mes émotions, mes mémoires, mes douleurs nichées à droite à gauche dans toutes les parties de mon corps. Je garde les yeux fermés et je me laisse ressentir, où c’est fluide, où c’est chaud ou froid, où c’est tranquille ou en colère, où c’est mort ou bien vivant, où c’est doux ou joyeux, où c’est triste, où ça fait mal. Je fais mon petit état des lieux intérieur au fil de la pelote…puis j’imagine que ce fil se transforme en rivière et je laisse l’eau claire et fraîche circuler dans toutes les parties du corps passées en revue.
Je reste bien concentrée sur l’intérieur de mon corps, sur tout ce qui se passe en moi.
J’imagine que cette eau souterraine vient éteindre le feu, je ressens sa pureté, sa fraîcheur, sa limpidité ; elle vient nettoyer chacune de mes plaies, je la laisse bercer, baigner les zones les plus inflammées, douloureuses. Je m’y arrête et je respire dans cette eau circulante. J’y ajoute la ou les couleurs que je souhaite ; je colore l’eau des émotions qui me font du bien et je laisse la couleur se répandre, l’eau porteuse de mes émotions recirculer encore et encore, jusqu’à ce que je m’endorme ou que je rouvre les yeux. Mon cerveau doucement mais sûrement, se reconnecte en sécurité avec mes émotions, comprend qu’il peut se rassurer et ne plus déclencher d’incendie à chaque contact du corps avec la matière. Je tiens mon fil de vie et c’est moi qui décide comment je l’alimente ; quels émotions ou aliments je digère ou pas ; ce que je laisse circuler ou non en moi. Ce que je ressens a de la valeur. J’ai le droit de dire Oui ou de dire Non. Je ne tiens qu’à un fil, celui de ma Vie !

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